mercredi 6 février 2008

Des Psy4 pas si fous…


Fatigués mais heureux, les Psy4 de la Rime ressortent d’un concert donné à Lyon. Nous les avons coincés entre deux portes pour vous, où Alonzo et Soprano ont répondu patiemment et avec bonne humeur à nos questions.

BBLACK : Pour votre premier album Bloc party , la chanson « à cœur ouvert » a beaucoup marqué les jeunes ; quelles ont été vos inspirations ?

A: Nos vies, nos vies il y a 6 ans ; maintenant c’est pire (rires) !

B : Trouvez-vous qu’il y a eu des évolutions dans les communautés ?

A & S: Oui, on commence à remarquer des changements, même chez les parents. Je me suis marié avec une métissée italienne, espagnole, française ; avant ils étaient contre car elle n’était pas comorienne. On est totalement pour le métissage, les enfants métis sont magnifiques. Ca prouve qu’il y a une ouverture d’esprit chez les gens.

B : On est parti voir votre site et dans une de vos chansons, vous dites « nos quartiers ne sont pas des cimetières », quel rapprochement pourriez-vous faire avec l’actualité, notamment avec les crises de banlieues en 2005 ?

A : C’est une histoire qui vient de loin. Le malaise social est apparu en premier quand les colons ont débarqué en Afrique.
S : Les jeunes ne savent pas pourquoi ils sont français, ils ne connaissent pas leur histoire. Ils sont perdus alors ils se révoltent. Renaud le disait déjà dans ses chansons. Mais il n‘y a pas que des émigrés dans les quartiers, il y a aussi des Français qui se sentent rejetés par leur société ! La discrimination est partout. A Marseille, on est tous parqués mais on nous fait sentir qu’on est marseillais et ça change tout.

B : Les jeunes veulent vous imiter, pensez-vous que ce soit un « effet de style » dû à la mode comme le dit votre chanson?

S : On dirait maintenant, avec toutes ces émissions de Télé-réalité, qu’être une star, c’est un métier. Le rap, c’est la musique du peuple car il te suffit d’une feuille et d’un stylo, pas besoin de grosses maisons de disque.
A : Il n’y a que là qu’ils se sentent représentés. Aux USA, dans les séries, ils voient des avocats, des policiers… Mais en France, il n’y a que la musique et le sport. Mais ce n’est pas facile, il faut un peu de talent, de la chance et beaucoup de travail. On est les premiers à dire qu’il vaut mieux être à l’école et être conscient de la réalité. Après, si c’est une passion…

B : Beaucoup de vos fans sont anorexiques, vous leur donnez des conseils et de l’espoir à travers vos albums ?

A : On n’est pas parfaits. Au début, on faisait du rap parce que c’était la mode ; maintenant c’est pour devenir meilleur dans la vie. Les chansons sont nos confessions, ça nous sert de thérapie.
S : Les jeunes ne se sentent pas seuls en nous écoutant, ils se reconnaissent dans nos textes. On partage nos douleurs, nos galères… Nos chansons leur donnent plus d’espoir car on les soutient.

B : Votre rencontre avec Ana Torroja, la chanteuse de Mécano ?

A & S : Au début, c’était la galère car on n’était pas connu. On avait entendu un jour le refrain de « Hijo de la luna » et ça nous a fait penser à notre enfance et à celle qu’a un enfant de quartier : il rentre de l’école, les parents se disputent à la maison et le gosse va traîner dans son quartier jusqu’à tard le soir, et du coup, le lendemain il dort en classe… C’est un cercle vicieux. A 25 ans, il s’ennuie et alors il fait des bêtises ; et à 35, ils deviennent fous car ils ne peuvent pas assumer leur famille. On a trouvé que le refrain de la chanson était une bonne métaphore. En plus, Comores veut dire lune.

B : Que pensez-vous des femmes comme Diam’s qui réussissent dans la musique, surtout le rap ?

S : C’est bien, on est content. C’est difficile pour elles car le rap est un milieu de machos ! Il y a même des frères qui veulent pas lâcher leur sœur et qu’ils les suivent partout jusque sur scène ! On le fait peut-être mal mais c’est vrai qu’on voit ça comme une protection. Mais ça change, déjà par la position de la femme dans la société. Le métissage n’est pas seulement dans la couleur.
A : Les femmes ressentent nos textes autrement. C’est enrichissant et on est super content de ça.

B : Pourtant, dans une de vos chansons, on a l’impression que vous ne la respectez pas…

A : Non, pour nous, la Mama est sacrée. La femme aussi. On se trompe souvent de guerre ; ceux qui les insultent, c’est souvent pour se la péter face à leurs potes.

B : Vous dites « la femme est la pire arnaque de l’homme »…

A : Ca, ce sont des histoires perso, c’est pour ça. Mais on est loin de tout ça maintenant, on est marié.

B : qu’est-ce qu’il faudrait pour vous séduire si vous n’étiez pas marié ?

A & S : Le respect. Dans les deux sens. On va pas taper le premier mec qui mate notre femme, même si ça démange ! Et pour que ça dure, le moins de mensonge possible et les enfants, car c’est deux personnes en une seule, c’est beau.

B : On vous voit pas trop sur les gros concerts…

A : C’est dû au système de la musique. Il y a de grosses maisons de disque qui ont le pouvoir médiatique. Nous, on est indépendant alors on fait tous les concerts, même les petits. On a un public très mixte, ça dépend des villes. On fait comme nos albums, à l’instinct !

B : Des projets ?

A & S : Single, concerts, un 3ème album et des albums solos. Mais c’est dur de laisser sa famille. Dans l’histoire, ce sont elles les guerrières…

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